CAA Versailles, 2 juillet 2020, Société Ducrocq Ingénierie et Process, req. n° 17VE02206
Conformément à la jurisprudence du Conseil d’État (CE, 9 mars 2018, Cne de Rennes-les-Bains, req. n° 406205), la cour administrative d’appel de Versailles rappelle que « le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur le fondement de la responsabilité décennale ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d’ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il n’apparaît pas que les désordres lui soient en quelque manière imputables »
En l’espèce, il résulte de l’instruction, que le dysfonctionnement du vérin d’un pont provient de la rupture des vis et que le désordre est par suite imputable à la société titulaire du marché.
En outre, la cour rappelle conformément également à la jurisprudence du Conseil d’État (CE, 9 novembre 2018, Commune de Saint Germain-le-Châtelet, req. n° 412916), qu’ « il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d’épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l’ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s’ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l’expiration du délai de dix ans. La responsabilité décennale du constructeur peut être recherchée pour des dommages survenus sur des éléments d’équipement dissociables de l’ouvrage s’ils rendent celui-ci impropre à sa destination. La circonstance que les désordres affectant un élément d’équipement fassent obstacle au fonctionnement normal de cet élément n’est pas de nature à engager la responsabilité décennale du constructeur si ces désordres ne rendent pas l’ouvrage lui-même impropre à sa destination »
En l’espèce, le dysfonctionnement du vérin provoqué par la rupture des vis en inox a conduit à l’immobilisation du pont mobile que le maître d’ouvrage ne pouvait faire pivoter afin de permettre la circulation automobile au-dessus du canal. Dans ces conditions, dès lors que le maître d’ouvrage ne pouvait plus effectuer les opérations de rotation et de levage du tablier du pont-mobile, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les désordres étaient de nature à rendre l’ouvrage impropre à sa destination et à engager la responsabilité décennale de la société requérante.
Eric GINTRAND
Avocat associé